Un message de Clément Fleurenceau, notre paysan-boulanger

Les épis sont sortis ! C’est l’épiaison !

« Je voulais partager avec vous quelques photos de ma parcelle de blé de cette année dont je suis assez content, et en profiter pour vous décrire son histoire, qui est en partie celle de mon métier.

La parcelle a été semée en décembre 2019, le blé sera récolté cet été 2020 et servira à faire le pain en 2021 !

C’est une parcelle de 6 ha 80 d’un seul tenant, qui me permettra, pour la première fois depuis mon installation, de récolter tout mon blé sur une seule parcelle et à proximité de chez moi (5 km seulement), un gain de temps et d’énergie important comparé aux années précédentes.

Cette parcelle a été reprise en décembre 2017, elle était en friche depuis 2 ans et est donc passée directement en deuxième année de conversion vers l’agriculture biologique. Elle est ensuite passée en bio en décembre 2018.

J’ai travaillé la parcelle pendant le printemps et l’été 2018 pour éliminer un maximum de « mauvaises herbes » puis l’ai semée avec différents trèfles début octobre 2018, pour couvrir le sol et l’enrichir, grâce à ces plantes légumineuses qui apportent naturellement de l’azote.

L’été très sec jusqu’à fin septembre 2019, suivi directement d’un automne très pluvieux ont rendu vraiment difficiles les conditions de semis cette année. Et ceci pour tous les céréaliers : nous n’avons pas pu préparer nos terres comme d’habitude, beaucoup n’ont pas été semées, et beaucoup de semis ont été noyés par les grandes quantités d’eau qui engorgeaient les parcelles.

Dans ce contexte, je suis très content d’avoir réussi un bon semis malgré tout, en limitant les passages. Après une accalmie, je me suis donc résolu à labourer la parcelle fin octobre, le seul moyen de la préparer rapidement étant données les conditions météo. Puis, après une autre semaine sans pluie début décembre, et avant le retour d’une nouvelle perturbation, je me suis lancé dans la parcelle avec le semoir, un peu perplexe tout de même ! Et avec beaucoup de chance, j’ai réussi à semer toute la parcelle dans la journée, et dans de bonnes conditions, c’est-à-dire sans « maltraiter » le sol. Ouf !!

Depuis le blé pousse à son rythme et, au début du mois de mai, les épis sont sortis, comme vous pouvez le voir sur une des photos, c’est l’épiaison.

Vous pouvez également voir que la parcelle est bien verte, signe de sa bonne santé et de sa fertilité. Car souvent au printemps, les parcelles menées sans apport d’engrais extérieurs (comme c’est mon cas) jaunissent un peu par manque d’azote disponible pour les plantes.

Vous noterez aussi que la parcelle se situe dans un environnement préservé, entourée de bois, de prairies naturelles et d’une petite route peu fréquentée !

Et vous pouvez enfin remarquer que les épis sont plus petits que ceux des variétés de blés modernes, mais j’estime que la qualité est bien meilleure pour en faire du pain.

J’espère donc produire entre 20 et 25 quintaux, c’est à dire 2 à 2,5 tonnes par hectare, soit entre 13 et 17 tonnes de blé pour la parcelle. Un rendement et une production dérisoires comparés aux champions du conventionnel. Mais avec des coûts de production assez faibles (pas d’engrais, pas de traitements) et une bonne valorisation par la transformation, cette production, ainsi que celle du seigle et de l’épeautre, nous assurent à moi et ma compagne un revenu correct, tout en ayant un faible impact sur l’environnement.

Voilà l’histoire qui se cache derrière ces quelques photos… Et une petite partie de l’histoire qui se cache derrière les tartines de pains !

Car il faut ensuite récolter, trier, stocker, moudre et panifier ce grain.

Voilà tous les métiers des paysans-boulanger. »

La parcelle de blé vue du Nord
La parcelle de blé vue du Sud